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Canadian Public Health Association

Itinérance et santé publique

Itinérance

Chaque soir au Canada, 35 000 personnes se retrouvent sans abri1. Ces gens sont des jeunes, des adultes, des aînés et des familles avec enfants, et ils font partie des plus de 235 000 Canadiens qui vivent dans la rue à un moment ou l’autre au cours d’une année2. Ces chiffres ne cessent de grimper malgré les près de 7 milliards de dollars dépensés en 2014 en services de soins de santé, en aide juridique et en services sociaux pour contrer l’itinérance1. Il n’existe pas de données nationales, mais les villes constatent des hausses du recours aux maisons d’hébergement : les taux dans le Grand Moncton ont augmenté de 8 % entre 2013 et 2014, et ceux de Winnipeg ont gagné 14 % entre 2008 et 20113,4. Vancouver a déclaré la plus grande population sans abri de son histoire en 20145.

Pour compliquer les choses, au moins le tiers des sans-abri au Canada vivent avec des maladies mentales, et de telles circonstances sont souvent combinées à la toxicomanie6. La difficulté particulière de cette population est que dans bien des cas, elle doit rester sobre pendant un certain laps de temps avant d’être jugée « apte » à bénéficier d’un logement17. Comme la drogue et l’alcool servent souvent à masquer la douleur mentale ou physique, il est particulièrement difficile pour les sans abri de rester sobres sans avoir d’abord résolu leurs problèmes sous-jacents6, mais ces problèmes sont presque impossibles à résoudre quand la priorité est de survivre7.

Il y a une autre façon d’aborder la question. Le modèle Housing First (Logement d’abord), lancé à New York il y a plus de 20 ans, est devenu une pratique établie pour améliorer la vie des sans-abri8. En logeant les sans-abri, Logement d’abord subvient à leur besoin fondamental de survie et leur permet de travailler à améliorer leur santé et leur bien-être7.

Les données des États-Unis permettent d’être optimiste au sujet de ce modèle. Des études font état de taux élevés de conservation des logements, de baisses de la consommation d’alcool et de hausse de l’observance thérapeutique9. Il y a bien d’autres avantages à être logé, comme de renouer avec les membres de sa famille, de réduire le risque de violence et de promouvoir la participation aux services de santé préventifs9. Ces effets ont amené le Département américain du logement et des affaires urbaines à appuyer le modèle Housing First, et le Interagency Council on Homelessness des États-Unis à le citer comme une « pratique exemplaire »10. La question est de savoir ce qu’il faudra faire pour obtenir des résultats positifs au Canada.

Un essai du modèle mené de 2012 à 2014 a suivi 2 000 personnes à Moncton, Vancouver, Winnipeg, Toronto et Montréal. Les résultats de cet essai ont été positifs en ce qui concerne la qualité de vie, le fonctionnement dans la communauté, le rétablissement et l’emploi7. En majorité, les personnes nouvellement logées réussissent à conserver leur logement, font état d’améliorations dans leur consommation de substances et leurs maladies mentales et disent avoir redressé leur trajectoire de vie7. Les chercheurs qui ont mené cet essai ont bon espoir qu’avec le temps, la stabilité du logement permette des améliorations de la santé mentale et de la consommation de substances dans les populations autrefois sans abri; toutefois, on ne sait pas encore clairement dans quelle mesure Logement d’abord peut améliorer la santé mentale et la consommation de substances à long terme7.

On estime que les investissements nécessaires pour limiter l’itinérance au Canada sur une période de 10 ans s’élèveraient à 44 milliards de dollars, mais que le rendement estimatif de ces investissements pourrait dépasser 8 milliards par année, à l’échelle nationale, en réduisant les dépenses en hébergement d’urgence, en soins de santé, en services sociaux et en services correctionnels1,2. Par exemple, une journée passée dans un logement social supervisé coûterait au moins 38 $ de moins que l’occupation d’un lit dans une maison d’hébergement, 112 $ de moins qu’une journée en prison et 624 $ de moins qu’une journée dans un hôpital psychiatrique11. Obtenir un logement stable n’entraîne pas toujours des améliorations rapides dans la vie des Canadiens sans abri, mais c’est un premier pas vers l’amélioration de leur santé et peut, en bout de ligne, leur permettre de contribuer à la société.


  1. Gaetz S, Donaldson J, Richter T, Gulliver T (2013). The State of Homelessness in Canada: 2013. Toronto (Ontario) : Canadian Homelessness Research Press. Sur Internet : www.homelesshub.ca/sites/default/files/SOHC2103.pdf (consulté le 20 février 2015).
  2. Gaetz S, Gulliver T, Richter T (2014). The State of Homelessness in Canada: 2014. Toronto : The Homeless Hub Press. Sur Internet : www.homelesshub.ca/sites/default/files/SOHC2014.pdf (consulté le 20 février 2015).
  3. The Greater Moncton Homelessness Steering Committee (2014). Experiencing Homelessness: 7th Report Card on Homelessness in Greater Moncton. Sur Internet : www.monctonhomelessness.org/documents/2014-7th-report-card-gmhomelessness.pdf (consulté le 20 février 2015).
  4. Social Planning Council of Winnipeg (2012). A Place to Call Home: Homelessness in Winnipeg in 2011. Sur Internet : www.spcw.mb.ca/files/4013/3917/1275/A_Place_to_Call_Home_FINAL.pdf (consulté le 20 février 2015).
  5. Howell M (2014). Homeless population largest in Vancouver’s history: Street homeless almost double from last year to 538 people. Vancouver Courier 30 avril 2014. Sur Internet : www.vancourier.com/news/homeless-population-largest-in-vancouver-s-history-1.981891#sthash.SlW1a67Y.dpuf (consulté le 20 février 2015).
  6. Khandor E, Mason K, Schaefer-McDaniel N (2009). Street Health Report 2007 Bulletin #4 : Homelessness, Mental Health & Substance Use. Toronto : Street Health. Sur Internet : www.streethealth.ca/downloads/homelessness-mental-health-and-substance-use-research-bulletin-4-october-2008.pdf (consulté le 20 février 2015).
  7. Goering P, Veldhulzen S, Watson A, Adair C, Kopp B, Latimer E, et al (2014). Rapport final du projet pancanadien Chez Soi. Commission de la santé mentale du Canada (CSMC). Sur Internet : www.mentalhealthcommission.ca/sites/default/files/mhcc_at_home_report_national_cross-site_eng_2_0.pdf (consulté le 20 février 2015).
  8. Pathways to Housing (2015). Pathways to Housing First: Our Model. Sur Internet : pathwaystohousing.org/our-model/ (consulté le 20 février 2015).
  9. Shimer S, Driscoll D, Johnston J, Hedwig T, Barker R, Chapman C (2014). Housing First an Effective Solution to Homelessness in Alaska [presentation]. American Public Health Association Annual Meeting and Expo. New Orleans (Louisiane) : APHA. Sur Internet : https://apha.confex.com/apha/142am/webprogram/Paper307536.html (consulté le 20 février 2015).
  10. Waegemakers Schiff J, Rook J (2012). Housing First: Where is the Evidence? Toronto : Homeless Hub. Sur Internet : www.homelesshub.ca/sites/default/files/HousingFirstReport_final.pdf (consulté le 20 février 2015).
  11. Canada Homeless Research Network (2009). Nos projets : L’Itinérance. Sur Internet : www.chra-achru.ca/fr/index.php/our-work/homelessness/ (consulté le 20 février 2015).

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