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Canadian Public Health Association

Tsay Keh Dene, une communauté éloignée, mais résiliente

Tsay Keh Dene logo

Tsay Keh Dene est une communauté des Premières Nations de la Colombie-Britannique d'environ 290 personnes; son histoire tragique de transplantation et de répression ressemble à celle de nombreux peuples autochtones, mais elle est intensifiée par l'inondation massive de son territoire traditionnel et de ses lieux de sépulture pour faire place au barrage W.A.C. Bennett. Le manque de ressources suffisantes, mais surtout l'isolement de la communauté, ont été préjudiciables à son développement. Cependant, grâce à une vaste collaboration et à une nouvelle autorité sanitaire, la First Nations Health Authority (FNHA), un changement pointe à l'horizon. La démarche « communautaire et nationale » prônée par la FNHA permet aux communautés des Premières Nations de jouer un rôle actif dans l'administration des services de santé.

« Les communautés isolées ont des besoins uniques; les normes culturelles y sont différentes, et par le passé, les décisions concernant les programmes et les services ont parfois été prises sans les consulter, ce qui a créé de la confusion et des pratiques non efficientes. C'est en train de changer peu à peu » note Paul Coppard, le coordonnateur du « pôle Finlay » (Finlay HUB), qui facilite la transition vers la nouvelle FNHA.

Paul Coppard Écoute
Écoutez Paul Coppard en anglais (MP3 : 9:20)

Par une mobilisation et un réseautage élargis avec les ministères concernés et les membres de la communauté, on met au jour les difficultés et les besoins potentiellement différents des communautés des Premières Nations. Deeanna Daniels, directrice de la santé pour Tsay Keh Dene, souligne que la clé a été de mélanger les savoirs culturels et les valeurs traditionnelles avec les connaissances générales. Des soupers trimestriels avec les membres de la communauté ont contribué à cerner les besoins et les interventions possibles. On a aussi consulté la communauté après les interventions pour recevoir un retour d'information.

Mieux vaut prévenir

Auparavant, la communauté était aux prises avec de fortes hausses des taux de diabète, mais les nombreux programmes mis en oeuvre pour combattre cette maladie étaient inefficaces. Les autorités sanitaires ont vite réalisé que des mesures de prévention et des pratiques de vie plus saines donneraient de meilleurs résultats. Au lieu d'instaurer d'autres solutions inefficaces axées sur le traitement, on a donc acheminé des ressources vers la formation des travailleurs de la santé pour qu'ils puissent recommander des options plus saines aux patients. Or, pour modifier les modes de vie et le régime, il faut que des choix sains soient disponibles et accessibles.

Malheureusement, comme l'indique Mme Daniels, « quand on vit dans une communauté isolée, le choix n'existe pas », mais c'est une réalité que les autorités sanitaires de Tsay Keh Dene s'emploient à changer. Mme Daniels a piloté plusieurs de ces changements dont les résultats sont prometteurs, comme la gestion du magasin communautaire, l'introduction d'un centre de conditionnement physique et l'organisation de soupers thématiques axés sur la santé. Le magasin communautaire a été absorbé par la clinique de santé et offre des choix alimentaires plus sains, qui concordent avec les conseils nutritionnels. On y trouve maintenant un rayon « choix futés » qui propose à la clientèle des options santé, des aliments biologiques et des produits adaptés aux besoins alimentaires spéciaux, comme les allergies au gluten. On a ouvert un centre de conditionnement physique et de nutrition en plus d'un poste de vélos en libre-service.

Une importante intervention, née des soupers, a été d'intégrer des médicaments traditionnels dans la panoplie du centre de ressourcement et de traitement. Ainsi, les membres de la communauté peuvent obtenir des soins de santé mieux adaptés et plus sensibles à leurs besoins.

À la redécouverte d'anciennes pratiques

Selon M. Coppard, les jeunes générations redécouvrent les pratiques d'antan et les intègrent mieux, en insistant sur les pratiques traditionnelles dans tous les aspects de la vie quotidienne. Les jardins communautaires, qui existent depuis des générations sous forme de jardins familiaux secrets, occupent maintenant le devant de la scène et sont florissants. Ces jardins sont un excellent moyen pour les générations d'aînés d'enseigner aux enfants les pratiques agricoles, alimentaires et nutritionnelles traditionnelles. L'engouement actuel pour les aliments biologiques et locaux n'est pas unique, dit Mme Daniels, car les communautés des Premières Nations ont toujours pratiqué l'agriculture et la chasse au lieu d'acheter à l'épicerie. Le Programme d'aide préscolaire du gouvernement du Canada est une autre façon de mieux éduquer la jeune génération; on s'en sert pour enseigner aux enfants les traditions, la culture et la langue tsek'ene en impliquant les aînés de la communauté. On a créé des bulletins communautaires pour joindre les membres qui ne sont pas aussi impliqués et qui sont moins enclins à assister à des réunions.

À présent, on tient régulièrement des journées d'accueil communautaires durant lesquelles les membres de la communauté peuvent obtenir en face à face de l'information sur la santé, la justice, l'éducation et le logement. Cette formule est plus efficace pour informer les gens et pour écouter leurs préoccupations individuelles. La communauté songe aussi à se doter de champions bénévoles qui trouveraient des moyens ingénieux de transmettre les messages sur la santé.

En plus de la sensibilisation accrue aux questions de santé et de nutrition, la participation à la vie sociale et les liens sociaux se sont renforcés. On observe davantage de cohésion communautaire : les anciens se rassemblent pour prendre une marche le soir, et les vélos en libre-service sont utilisés quotidiennement. La situation s'est aussi améliorée de façon radicale depuis que du personnel infirmier et des infirmières et infirmiers praticiens travaillent à plein temps dans la communauté.

Conseils aux autres communautés

« Je me suis étonné moi-même l'autre jour en réalisant que certains de mes repas les plus sains ce mois-ci avaient été préparés à Tsay Keh Dene - la dernière fois, c'était un souper ukrainien avec un ragoût de légumes, accompagné de viande d'orignal pour faire bonne mesure! dit M. Coppard. À ma dernière visite, nous avons passé la soirée à faire de l'exercice avec des membres de la communauté dans le nouveau studio de conditionnement physique du village et nous avons écourté une réunion pour que les villageois puissent s'entraîner dans le gymnase de l'école en prévision de la course du Vancouver Sun. »

M. Coppard souligne qu'il n'y a pas qu'une seule façon de faire les choses, et que les approches multiples sont les plus prometteuses pour apporter des changements efficaces. « Le plus important, c'est de définir plus clairement les besoins d'une communauté et d'essayer d'appliquer de petits changements simples et rapides pour que les membres sachent que l'on répond à leurs besoins. » Pour évaluer les besoins et écouter les membres de la communauté, il a fallu modifier les pratiques; faire connaître les outils disponibles est un bon point de départ.

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