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Canadian Public Health Association

Quel est l’intérêt supérieur de l’enfant?

Une perspective de santé publique à l’égard du jeu libre des enfants au Canada

Remerciements

L’ACSP exprime sa reconnaissance et ses remerciements à la Fondation Lawson pour son généreux soutien. Nous remercions aussi pour leur soutien indéfectible tous les bénéficiaires de la stratégie sur le jeu à l’extérieur de la Fondation Lawson qui ont examiné les différents volets de ce travail et en ont déterminé les orientations. Le comité consultatif du projet mérite des remerciements particuliers pour son encadrement et ses conseils, qui ont assuré le bon déroulement du projet.

Problème pernicieux (définition) –

  • Un problème complexe auquel il n’existe pas de solution simple.1
  • Un problème social ou culturel difficile ou impossible à résoudre en raison du caractère incomplet ou contradictoire des connaissances, du nombre de gens ou d’opinions en cause, de la lourdeur du fardeau économique et/ou de l’interdépendance du problème avec d’autres.2

Préface

En décembre 2015, la Fondation Lawson, dans le cadre de sa Stratégie sur le jeu à l’extérieur, offrait une subvention à l’Association canadienne de santé publique (ACSP) pour qu’elle prépare une trousse d’outils stratégiques d’atténuation des risques visant à favoriser l’accès des enfants au jeu. On voulait ainsi  « Améliorer l’accès des enfants canadiens au jeu libre, y compris aux terrains de jeux d’aventure, en élaborant une trousse de politiques contenant des méthodes et des stratégies pour répondre aux inquiétudes des gestionnaires municipaux, des membres des conseils et commissions scolaires et des élus municipaux, ainsi qu’aux perceptions parentales, à l’égard des responsabilités et des risques du jeu comportant des risques »  [traduction libre]. Par la suite, la portée de ce travail a été élargie au jeu librea, dont le jeu comportant des risques est un élément. Les résultats sont présentés dans la  Trousse sur le jeu libre des enfants,  dont le présent article fait partie ainsi que sept mémoires de recherche, cinq infographies, six mécanismes d’intervention et une collection de pratiques prometteuses. L’article a aussi mené à un énoncé de position de l’ACSP sur le  Jeu libre des enfants  et à la reconnaissance de problèmes complexes qui font l’objet du présent document de base.

But

Reconnaître certains des problèmes complexes qui font obstacle à l’accès et à la participation des enfants au jeu libre :

  • Le nouveau visage des enfants au Canada;
  • Les perceptions des parents, des proches aidants, des éducateurs en garderie et des enseignants;
  • La communication des risques;
  • La responsabilité juridique.

Introduction

Le jeu libre est l’affaire des enfants3. Il fait partie intégrante du développement sain de chaque enfant et est enchâssé dans la  Convention relative aux droits de l’enfant à l’article 31. Les enfants et les jeunes ont tous besoin de temps, d’un lieu approprié et d’occasions de se livrer au jeu libre, de prendre des risques et d’en recueillir les bienfaits.

Définir le « jeu » présente toutefois un défi. De nombreuses formes de jeu ont été recensées et décrites ailleurs4. Dans le présent document, il est question du jeu libre, c’est-à-dire du jeu qui se produit quand les enfants suivent leurs instincts, leurs idées et leurs intérêts sans se voir imposer un résultat5. Le jeu libre peut inclure des formes de jeu comportant des défis et offrir la possibilité d’explorer des frontières, ce qui permet aux enfants de déterminer leurs propres limites dans une variété d’environnements naturels et bâtis. Le jeu libre englobe les formes de jeu comportant des risques et peut inclure : le jeu en hauteur; le jeu avec la vitesse; le jeu avec des éléments détachés; le jeu de bataille; et le jeu où les enfants peuvent disparaître ou se perdre6. Les adultes peuvent faciliter le jeu libre, mais non l’imposer. Ni le sport organisé, ni le temps d’écran (passé devant la télévision, l’ordinateur, une console de jeu, une tablette, un téléphone intelligent ou tout autre dispositif électronique) ne sont considérés comme des formes de jeu libre. Les avantages associés au jeu actif à l’extérieur, un élément du jeu libre, sont décrits dans un énoncé de position publié en 2015 par ParticipACTION et dans une revue systématique connexe7. Ces travaux ont reçu l’appui du Conseil des médecins hygiénistes en chef pour le Canada8.

Le jeu libre (à l’intérieur comme à l’extérieur) comporte les avantages suivants :

  •  Santé physique et développement de la motricité globale :  Le jeu libre actif réduit les comportements sédentaires, favorise les poids-santé9 et améliore la motricité10. Il réduit l’adiposité (surpoids ou obésité) et améliore la condition musculosquelettique et la santé cardiovasculaire11.
  •  Santé mentale et stabilité émotive :  Le jeu libre favorise le bien-être mental et affectif des enfants7,12, notamment le concept de soi positif13 et l’estime de soi14. Il appuie la formation et l’entretien de liens d’amitié qui, en retour, favorisent le maintien d’une bonne santé mentale15, tandis que le jeu physiquement actif peut réduire l’anxiété et les symptômes dépressifs11,16. Une récente revue systématique renforce notre compréhension des avantages du jeu libre à l’extérieur et prouve les bienfaits des interactions avec la nature pour la santé mentale des enfants et des adolescents17.
  •  Santé sociale et travail d’équipe :  Le jeu libre aide les enfants à améliorer leurs aptitudes sociales11, comme l’intelligence émotionnelle, la conscience de soi, l’empathie et la capacité de communiquer efficacement dans les situations où le compromis et la coopération sont nécessaires11,13.
  •  Apprentissage et attention à l’école : Il est prouvé que le jeu libre favorise le développement des aptitudes cognitives (l’attention, la concentration, la capacité de garder le cap sur sa tâche et la mémoire)18 et qu’il améliore les comportements en classe19.
  •  Résilience et habiletés de gestion des risques : Quand les enfants font l’expérience de l’incertitude durant les jeux comportant des défis, ils développent leurs réactions émotionnelles, leurs aptitudes physiques et leurs habiletés d’adaptation et améliorent leur capacité de faire face à l’adversité20,21,22. De bonnes habiletés d’adaptation favorisent la résilience et la bonne santé mentale nécessaires pour s’épanouir à l’adolescence et à l’âge adulte23.

Quand leur participation au jeu libre est limitée, les enfants sont plus susceptibles d’avoir des comportements sédentaires et sont privés des bienfaits du jeu libre pour leur bon développement affectif, mental, social et physique24. Pour contrer la sédentarité accrue du mode de vie des enfants, il y a eu récemment un appel aux enfants et aux jeunes du Canada à avoir « un corps actif pour un cerveau en santé »25. Les enfants canadiens bougent moins qu’avant, s’assoient davantage et se font imposer plus de limites à l’intérieur et à l’extérieur de l’école. Un tel résultat n’est pas limité au Canada : dans le monde, 23 % des adultes et 81 % des adolescents (11 à 17 ans) ne respectent pas les recommandations mondiales pour l’activité physique26.

Points communs entre la santé publique et le jeu libre

L’accès des enfants au jeu libre jette les bases d’une meilleure santé physique, psychologique et sociale et favorise la résilience à l’âge adulte. La santé publique est une façon de maintenir et d’améliorer la santé des populations qui met la promotion et la protection de la santé, la surveillance de la santé des populations et la prévention des décès, des maladies, des traumatismes et des invalidités au cœur de toutes les initiatives connexes. Elle est aussi fondée sur les principes de la justice sociale, des droits de la personne et de l’équité, sur des politiques et des pratiques éclairées par des données probantes et sur la prise en compte des déterminants de la santé sous-jacents. Enfin, les initiatives de santé publique sont fondées sur méthodes fructueuses ou prometteuses s’appuyant sur des données probantes27. Ces points communs font de l’accès au jeu libre à la fois une question de santé publique et de promotion de la santé.

Malgré ces points communs, il existe une tension sous-jacente entre les acteurs qui souhaitent réduire la probabilité de blessures résultant du jeu libre des enfants et ceux qui reconnaissent les bienfaits physiques, psychologiques et affectifs du jeu libre à moyen et long terme tout comme ses risques inhérents. On sait aussi qu’une exposition systématique au jeu actif à l’extérieur développe des habiletés motrices qui préviennent les blessures, car les enfants deviennent plus conscients des mouvements de leur corps. Il est difficile de résoudre cette tension : il existe de nombreuses preuves à l’appui des bienfaits du jeu libre, mais les données sur les probabilités de blessures résultant du jeu se limitent à la description de l’endroit où une blessure s’est produite et à la façon dont elle s’est produite, ce qui complique la tâche d’en trouver la cause réelle. Il est difficile aussi de comparer le nombre d’enfants qui se blessent en jouant, et la gravité de leurs blessures, avec le nombre de blessures résultant de la participation au sport organisé. En effet, il ne se publie pas d’informations au Canada sur le nombre d’enfants qui se livrent au jeu libre ou sur leur exposition cumulative au jeu libre (sa durée) que l’on pourrait comparer au nombre connu d’enfants qui participent au sport organisé. Une revue systématique a porté sur les taux d’incidence des blessures nécessitant des soins médicaux (nombre de blessures par tranche de 100 heures) subies lors d’activités physiques organisées et non organisées28. La revue en question a déterminé que le nombre absolu de blessures était plus élevé dans les activités physiques non organisées que dans les activités physiques organisées, mais que les taux d’incidence respectifs des blessures étaient généralement inférieurs durant les temps de loisirs non organisés.

L’accès au jeu libre est une question de promotion de la santé. La promotion de la santé est une démarche d’amont qui favorise le développement et le maintien de la santé au cours de la vie. Au Canada, cette notion trouve ses racines dans le rapport Lalonde, qui faisait valoir que des modifications aux habitudes de vie ou au milieu social et physique entraîneraient probablement des améliorations de la santé29. Ce rapport a jeté les bases de programmes de sensibilisation aux risques pour la santé associés aux comportements et aux habitudes de vie individuels, dont la nutrition et la condition physique. Les bienfaits des activités de promotion de la santé ont été décrits plus avant dans un rapport publié en 1986 portant sur les facteurs sociaux, économiques et environnementaux influant sur la santé (publique)30, ainsi que dans la  Charte d’Ottawa pour la promotion de la santé31. La Charte définissait cinq domaines d’action prioritaires : l’élaboration de politiques pour la santé; la création d’environnements favorables; le renforcement de l’action communautaire; l’acquisition d’aptitudes individuelles; et la réorientation des services de santé. Le ministre fédéral et les ministres provinciaux et territoriaux de la Santé ont avalisé cette démarche en 199432, puis les concepts ont été approfondis dans un document de travail ultérieur33. En 2010, les ministres de la Santé ont publié une déclaration sur la nécessité de faire de la prévention des maladies et des blessures une priorité34. De même, un récent document de travail a noté la complexité de la série de facteurs sociaux, culturels et liés aux modes de vie qui influencent la consommation de substances par les jeunes; les auteurs y soulignent le besoin de démarches d’amont qui insistent sur le renforcement de la résilience plutôt que sur l’évitement des risques35.

Les ministres canadiens de la Santé sont déterminés à améliorer la santé et le bien-être de la population et reconnaissent les avantages des démarches d’amont ou de promotion de la santé; les médecins hygiénistes en chef provinciaux reconnaissent quant à eux que le jeu actif à l’extérieur est une activité nécessaire pour promouvoir la santé. Les orientations de la « charte du jeu de Calgary », de la  Trousse sur le jeu libre des enfants  de l’ACSP, des travaux du Groupe de recherche en vie active et obésité de l’Institut de recherche du CHEO, de ParticipACTION, de l’International Play Association (Canada), d’Outdoor Play Canada, de la Child and Nature Alliance of Canada, d'Earth Day Canada, de la Fondation Lawson, du BC Injury Research and Prevention Unit, d’une communauté de chercheurs dynamiques et de quelques organismes locaux, provinciaux et nationaux continuent de souligner les bienfaits du jeu libre et travaillent à en élargir l’accès pour améliorer la santé des enfants. Les questions qui se posent sont donc les suivantes :

  • Pourquoi l’accès des enfants au jeu libre est-il restreint?
  • Que pouvons-nous faire pour inverser la tendance?

Le nouveau visage des enfants au Canada

L’O’Brien Institute for Public Health a préparé une synthèse des sources de données fiables pour « peindre un portrait général des enfants au Canada »36. Il est indiqué dans son rapport qu’en 2016, il y avait environ 7,8 millions d’enfants et de jeunes (de 0 à 19 ans). À l’échelle du pays toutefois, le pourcentage d’aînés (65 ans et plus) dépasse maintenant celui des enfants, et cette tendance devrait prendre de l’ampleur. En pourcentage de la population, les enfants de 0 à 14 ans, qui constituaient 16,6 % en 2016, ne seront plus que 15,9 % en 2036, mais le nombre total d’enfants est censé croître au même rythme que la population générale. La distribution géographique des enfants complique encore les choses : les provinces de l’Atlantique, le Québec et l’Ontario devraient compter un pourcentage plus élevé d’aînés que d’enfants, tandis que les provinces de l’Ouest et les Territoires du Nord compteront probablement un pourcentage plus élevé d’enfants de 0 à 14 ans que d’aînés. Le profil démographique de ces enfants présente aussi une grande diversité au Canada. En 2016, environ 2,2 millions d’entre eux venaient de familles d’immigrants de première ou de deuxième génération, un chiffre qui devraient augmenter. La difficulté, dans ce contexte, est de comprendre leurs perceptions culturelles du jeu et d’y réagir, en travaillant avec les familles pour leur offrir les informations culturellement appropriées nécessaires pour qu’elles prennent des décisions éclairées.

Il est particulièrement important d’élaborer des démarches qui répondent aux besoins des enfants autochtones. Ces enfants (de 0 à 19 ans) étaient plus de 590 000 en 2016, et leur nombre devrait augmenter plus rapidement que le nombre total d’enfants. Les enfants autochtones sont singulièrement touchés par le racisme, la colonisation, le génocide culturel et la violence structurelle qui résultent des iniquités systémiques dans les lois, les pratiques sociétales et les bureaucraties gouvernementales au Canada et qui perdurent pour les mêmes raisons; ces iniquités systémiques ont entraîné la séparation des Premières Nations, des Inuits et des Métis de leurs terres, de leurs cultures, de leur spiritualité, de leurs langues et de leurs systèmes économiques et politiques traditionnels. Elles ont érodé les structures familiales et sociales et ont eu des conséquences sur le développement des enfants. Leurs effets sont décrits, en partie, dans le rapport de la Commission de vérité et réconciliation37 et les  Appels à l’action  associés38.

Les communautés autochtones sont confrontées à d’autres obstacles au jeu libre des enfants, dont l’accès restreint aux terres, le manque d’infrastructures de proximité, la vétusté des installations et les priorités concurrentes. Elles ont aussi des forces : l’avantage géographique de leur accès à l’eau et à la terre, leurs cultures, leurs traditions et leurs valeurs qui appuient le jeu libre et les enseignements des aînés. Les communautés inuites, par exemple, sont régies par la loi inuite (maligarjuat ), laquelle interdit aux parents de contrôler ou de punir leurs enfants. Par conséquent, les enfants inuits se livrent plus librement que les enfants non inuits à des pratiques de jeu qui seraient jugées risquées ou dangereuses. De plus, toute la communauté est censée participer à l’éducation des enfants, et les aînés ont une grande influence dans leur vie39.

La difficulté de communiquer les informations démographiques est que celles-ci n’ont pas été systématiquement collectées au fil des ans, ce qui complique la tâche d’élaborer une extrapolation valide des changements futurs dans la population. Malgré cette carence dans les données, il est clair que le nombre croissant d’enfants de familles immigrantes et autochtones nécessitera la création de possibilités de jeu culturellement appropriées et n’excluant personne.

Le scénario est compliqué par l’influence du statut socioéconomique (SSE) sur la santé des enfants. On sait que les personnes au bas du gradient social sont plus susceptibles d’avoir de mauvais résultats sanitaires que celles qui se trouvent au haut du gradient, et que les personnes de couleur et les Autochtones sont surreprésentés au bas du gradient social. Selon une étude, 76 % des enfants de moins de 5 ans vivant dans des ménages à faible revenu à Toronto étaient membres de minorités visibles. Les résultats sanitaires négatifs sont particulièrement manifestes chez les enfants de faible SSE; ainsi, la mortalité infantile (un indicateur courant des résultats sanitaires des enfants) était sensiblement plus élevée (6,5 pour 1 000) dans le quintile le plus pauvre des quartiers urbains canadiens que dans le quintile le plus riche (3,9 pour 1 000)40. Cet effet dépasse la mortalité infantile pour englober la mauvaise santé physique, les problèmes affectifs et comportementaux, la maturité scolaire et l’apprentissage, l’insuffisance de poids à la naissance et l’obésité. De même, les enfants des quartiers de faible SSE semblent plus susceptibles de subir des blessures mortelles et non mortelles. Ces taux de blessures supérieurs ont été expliqués par des facteurs comme la qualité des logements et le manque d’aires de jeu sûres. La difficulté, avec une grande partie des informations sur la santé et la prévention des blessures, est toutefois le manque de données nationales récentes, systématiques et comparables pouvant donner une indication claire de la nature et de la gravité des blessures et des lieux géographiques où elles se produisent.

Le manque de financement public pour la création d’aires de jeu est un problème de plus. Dans bien des situations, le financement de ces espaces provient des activités de collecte de fonds menées par les parents. Une telle option a toutefois ses limites dans les quartiers de faible SSE, où les parents sont moins susceptibles d’avoir l’argent et le temps nécessaires pour se charger d’activités de collecte de fonds, ce qui réduit leurs chances de succès. C’est pourquoi il est important de tenir compte du SSE du quartier en créant des possibilités de jeu, et de cibler particulièrement les quartiers de faible SSE.

Perceptions des parents, des proches aidants, des éducateurs en garderie et des enseignants

Les enfants d’aujourd’hui passent moins de temps à jouer dehors que les générations précédentes. Selon une enquête menée aux États-Unis, 70 % des mères disaient avoir joué dehors tous les jours dans leur enfance, contre seulement 31 % de leurs enfants, et 56 % disaient avoir passé 3 heures par jour ou plus à jouer dehors, contre seulement 22 % de leurs enfants41. Une étude menée en 2016 a elle aussi défini la nature changeante du jeu libre, dans l’Ouest canadien cette fois, et souligné le besoin d’interventions de proximité pour inverser les tendances actuelles42. Il y a de nombreuses raisons à ce changement. L’une d’elles est l’augmentation des pressions sociétales et dees attitudes parentales de surveillance et de surprotection, en partie en raison de l’évolution du climat social :

  • Le plus petit nombre d’enfants par famille, d’où l’augmentation de l’implication parentale dans les activités des enfants;
  • La commercialisation d’autres options que le jeu actif à l’extérieur, dont le temps d’écran durant les loisirs;
  • La société compétitive dans laquelle vivent les Canadiens, où la réussite est valorisée, avec des activités extrascolaires au programme avant et après l’école;
  • Les messages véhiculés dans les médias traditionnels et les médias sociaux, qui peuvent susciter de la peur à l’égard du jeu libre dirigé par l’enfant et rendre les gens réfractaires au risque;
  • La pression des autres parents, qui peut amener soit à participer à la culture de réussite, soit à limiter la participation des enfants aux jeux autodirigés;
  • Les normes de parentalité selon lesquelles un encadrement intensif par les parents est souhaitable;
  • Des facteurs géographiques ou socioéconomiques qui peuvent limiter l’accès aux endroits sûrs où jouer en milieu rural ou urbain.

Les nourrissons et les tout-petits ont besoin de supervision, mais il faut faire la part des choses entre les inquiétudes parentales mentionnées plus haut et les bienfaits du jeu libre adapté à l’âge des enfants, surtout entre 6 et 12 ans. Dans cette tranche d’âge, l’éducation « hélicoptère », l’hyper-parentalité et les autres formes extrêmes de parentalité (parents tigres, attachement extrême, négligence parentale au nom de l’indépendance des enfants, mères dragons)43 peuvent être perçues comme une érosion de la confiance parent-enfant44. L’hyper-parentalité, en particulier pour les enfants atteints d’incapacités physiques, peut avoir des effets nuisibles sur le mieux-être mental des enfants et causer des problèmes psychologiques et une baisse de la confiance en soi45. La surprotection parentale ou l’hyper-parentalité peuvent limiter la capacité de l’enfant d’errer sans surveillance pour se livrer au jeu libre. La mobilité indépendante des enfants, par exemple (les distances qu’ils ont la permission de parcourir sans supervision adulte), diminue à chaque génération46,47. La mobilité indépendante a un effet direct sur l’accès d’un enfant au jeu48, car les enfants qui peuvent parcourir de plus grandes distances sont plus susceptibles de rencontrer et de jouer avec des pairs49, d’être actifs et de jouer régulièrement à l’extérieur25. L’absence de mobilité indépendante réduit aussi la capacité d’un enfant de se rendre à l’école (à pied ou à bicyclette) par lui-même ou elle-même.

Communication des risques

Ces changements s’expliquent par la façon dont les parents, les proches aidants, les éducateurs en garderie, les enseignants et les décideurs perçoivent les influences de leur environnement, les comprennent et y réagissent. Au cœur de ces influences, il y a les normes sociales auxquelles les particuliers adhèrent dans leurs collectivités50. Les normes sociales désignent l’ensemble des comportements souhaitables et des règles informelles qui régissent les collectivités. En général, chaque personne essaie de comprendre les normes qui ont cours dans sa collectivité et a tendance à adapter ses comportements en fonction de sa perception de ces normes. En outre, au sein des collectivités, il y a souvent des personnes (les « référents sociaux ») qui ont une capacité supérieure de transmettre des informations et qui sont donc capables de façonner les comportements au sein de leur réseau. Les référents sociaux se reconnaissent à51 :

  • Leurs nombreuses connexions avec d’autres membres d’un réseau social en raison de leur statut, de leur popularité ou de leur plus grande habileté à socialiser,
  • Leur leadership au sein d’un sous-groupe d’un réseau social.

Les référents sociaux ont du succès quand leurs comportements attirent l’attention ou appellent d’autres membres à réagir. Ce succès est souvent obtenu à la faveur d’interactions fréquentes et personnellement motivées qui sont dynamiques et qui peuvent être inversées si la connexion est rompue. Dans nos collectivités, les référents sociaux peuvent soit créer des perturbations qui réduisent l’accès au jeu (par exemple en dirigeant un mouvement pour fermer une pente de toboggan), soit promulguer l’élargissement de l’accès aux aires de jeu.

Les gens entendent et interprètent les informations différemment toutefois, ce qui complique le scénario. La théorie sociale cognitiveb, et en particulier les connaissances heuristiquesc, peuvent influencer les décisions des autorités. Le cas échéant, les personnes les plus revendicatrices sur un enjeu ou celles qui sont le plus touchées par une situation peuvent influencer une décision même si elles ne représentent pas le point de vue majoritaire, et même si leur opinion n’est pas étayée par les faits. Un décideur peut par exemple décider de fermer une pente de toboggan sous la pression d’un parent ou d’un petit groupe de parents affectés par la blessure d’un enfant, sans tenir compte de tous les facteurs qui ont contribué à cette blessure.

Ces normes sociales subjectives peuvent aussi par contre orienter les actions en disséminant largement des informations compensatoires au sujet d’une situation pour contrer l’influence de normes indésirables (stratégie de comparaison sociale)52. Les informations en question peuvent être soit positives, soit correctives, mais il faut prendre garde d’éviter leurs effets pervers. Louanger excessivement une mesure particulière, par exemple, peut engendrer une réaction négative. Un tel effet peut être annulé en offrant des informations sommaires plus générales et non en mettant l’accent sur des faits marquants.

Les institutions, par exemple les gouvernements, peuvent aussi transmettre des informations par le biais de leurs décisions, de leurs actions ou en mettant en œuvre de nouvelles méthodes ou de nouveaux systèmes. Les particuliers présument ensuite inconsciemment que ces mesures reflètent les comportements souhaitables ou typiques du groupe que l’institution a pour clientèle. Pour faciliter la transmission d’informations par ces mécanismes, il faut que les gens puissent se reconnaître dans les sources d’informations et qu’ils les jugent légitimes et dignes de foi. C’est la démarche qui transparaît dans l’élaboration de la « charte du jeu de Calgary » (Calgary Play Charter53), qui engage la ville à fournir en tout temps des possibilités de jeu libre à ses citoyens. Toutes les municipalités auraient intérêt à créer des chartes semblables. Une autre solution pourrait être d’élaborer et d’instaurer la désignation de « ville amie du jeu », qui permettrait de mesurer l’appui d’une municipalité au jeu libre, en fonction de critères favorables aux initiatives de jeu, dans le but de lui décerner cette désignation. Il existe des initiatives semblables, dont celle des « villes amies des enfants » de l’UNICEF54 et, au Canada, la désignation de « communauté sécuritaire » octroyée par l’organisme Parachute55.

Les stratégies d’influence sociale sont particulièrement pertinentes avec la popularité actuelle des médias sociaux. Les sites de réseautage social (SRS) comme Facebook et Twitter offrent une plateforme sur laquelle se créent de nouvelles connexions et de nouveaux réseaux sociaux qui influencent souvent les comportements individuels. Les stratégies d’influence sociale impliquent d’ordinaire une combinaison de contenus générés par le système et par les utilisateurs, ce qui favorise des communications multidirectionnelles participatives et mobilisatrices56. Sur le plan individuel, les interventions articulées autour des SRS favorisent les comparaisons en permettant aux membres d’observer les comportements des autres, ce qui les amène à ajuster les leurs57. Un vaste essai comparatif randomisé a montré que les évaluations positives antérieures (« pouces levés ») d’une mention dans les médias sociaux peuvent changer l’opinion collective de cette mention en engendrant d’autres évaluations positives58. Sur le plan du groupe, la dissémination stratégique d’informations sommaires (c.-à-d. « ce que la plupart des gens font déjà ») peut influencer les normes sociales perçues et orienter les comportements des membres du groupe dans le sens de la norme souhaitée. De telles interventions sont plus susceptibles d’encourager les utilisateurs à adopter des comportements en phase avec les valeurs souhaitées et peuvent les préparer à accepter plus facilement certaines informations.

En appliquant de telles stratégies, il devrait être possible de contrer l’influence des personnes qui choisissent de limiter (intentionnellement ou non) l’accès au jeu; il s’agit d’élaborer des informations appuyées par des données probantes et de les communiquer aux parents, tuteurs, éducatrices, prestataires de services de garde ou décideurs sous une forme et une structure avec lesquelles ils sont à l’aise. Les messages peuvent souligner les bienfaits du jeu libre et l’importance que les enfants puissent jouer de façon indépendante, tout en rajustant la perception des risques. Il est particulièrement important d’influencer les décideurs pour qu’ils soient informés et capables de répondre aux personnes qui voudraient limiter l’accès au jeu libre.

Responsabilité juridique

Au Canada, les pouvoirs législatifs et réglementaires qui influencent l’accès des enfants au jeu appartiennent aux gouvernements provinciaux et territoriaux. Ces pouvoirs comprennent les lois qui traitent de l’éducation, qui définissent les exigences des services de garde à l’enfance et qui ont une incidence sur la responsabilité juridique. L’affectation de ces pouvoirs aux provinces et aux territoires permet à ces sphères de compétence d’élaborer et d’appliquer des programmes en réponse aux besoins de leurs citoyens, dont les intérêts varient d’une province et d’un territoire à l’autre. Elle instaure aussi une trame complexe de pouvoirs et de rôles et responsabilités qui limitent le développement d’une perspective nationale. Indépendamment de ce problème, plusieurs éléments influencent l’accès au jeu dans l’ensemble des provinces et des territoires.

Lois sur l’éducation
Chacune des 13 lois sur l’éducation du Canada présente un cadre des exigences en matière d’éducation des enfants de la province ou du territoire. La responsabilité d’appliquer ces exigences est déléguée aux conseils ou commissions scolaires locaux, lesquels peuvent établir, en réponse aux besoins des districts scolaires, des politiques et des programmes dont l’exécution est souvent confiée aux écoles. Cet écheveau complexe de relations peut influencer la prise de décisions à tous les niveaux et entraîner des disparités dans l’application des programmes et des décisions concernant, par exemple, la récréation à l’extérieur par mauvais temps ou la suppression de la récréation par mesure disciplinaire. Il y a aussi les conventions collectives des enseignants, qui définissent entre autres les exigences et les ratios d’encadrement des élèves.

L’effet de ces influences sur les activités des enfants à la récréation est particulièrement préoccupant. La récréation est le moment de la journée scolaire où les enfants devraient se livrer à des jeux actifs de leur choix, à l’extérieur, avec le moins possible d’intrusion des adultes. De retour en classe, ils sont ainsi plus aptes à exécuter leurs tâches. Une revue systématique fait état d’associations positives entre la récréation et le développement des aptitudes cognitives (l’attention, la concentration, la capacité de garder le cap sur sa tâche et la mémoire)59. Le jeu à l’extérieur et à la récréation renforce également les aptitudes de résolution de problèmes et de règlement des conflits60,61,62, tout en offrant des occasions d’apprentissage social et affectif, comme le contrôle de l’agressivité et la régulation des sentiments de colère et de frustration63.

Malheureusement, l’accès au jeu libre à l’école est souvent limité, en partie pour les raisons suivantes :

  • L’absence de temps désigné pour l’encadrement des élèves dans les conventions collectives, qui peut réduire la volonté d’accorder des occasions de jeu libre;
  • Des programmes d’études structurés autour d’expériences prescriptives de jeux moteurs (c.-à-d. d’activités organisées durant les cours de gymnastique), ce qui n’est pas la même chose que de prévoir du temps pour le jeu libre;
  • La restriction des activités libres à la récréation par l’utilisation de règles de sécurité excessives;
  • La suppression de la récréation à des fins disciplinaires;
  • La restriction ou l’interdiction du jeu à l’extérieur ou des récréations par mauvais temps.

Pour compliquer les choses, certains enseignants pensent qu’ils peuvent être tenus responsables ou faire l’objet de mesures disciplinaires si un enfant se blesse sous leur surveillance. Cette inquiétude est enchâssée dans le devoir de diligence des enseignants, indiqué dans les lois provinciales ou territoriales sur l’éducation (le devoir d’un parent avisé et éclairé, ou semblable à celui d’un parent bienveillant, ferme et éclairé [in loco parentis]), jumelé à la norme de diligence perçue. De plus, les enseignants croient souvent qu’ils ne sont pas assez formés pour promouvoir l’activité physique ou qu’ils n’ont pas l’instruction de le faire, et que les pratiques attendues limitent leur capacité de favoriser le jeu libre64. De façon similaire, en milieu de garde, les éducatrices peuvent accorder une plus grande priorité à la surveillance et à la sécurité des enfants qu’à leur besoin d’être actifs65. Ce genre de préoccupation est renforcé en raison du temps nécessaire pour préparer les enfants aux environnements en plein air et de la difficulté de leur offrir un encadrement vigilant66. Bien que ces constatations soient liées à la prestation des services dans les centres de la petite enfance, des réponses semblables ont été offertes durant nos entretiens avec des enseignants67. Par conséquent, les responsabilités des enseignants à l’égard de l’accès à la récréation devraient être clarifiées et uniformément appliquées par les conseils et commissions scolaires.

Lois sur les services de garde
En plus des lois sur l’éducation, les provinces et les territoires élaborent et appliquent des lois sur les services de garde, les garderies ou l’apprentissage et la garde des jeunes enfants (le nom exact peut changer d’une province ou d’un territoire à l’autre). Ces lois définissent en général les responsabilités des gestionnaires des services de garde et/ou des éducatrices et éducateurs de la petite enfance et les exigences à respecter par ces personnes, notamment en matière de supervision, de programmation, d’encadrement et de fonctionnement. Les lois sur les services de garde prévoient aussi en général des mécanismes d’octroi de permis et de conformité, l’allocation de fonds et de ressources aux services de garde, aux installations hébergeant des services de garde et à la mise en œuvre des services dans la province ou le territoire en question. Elles peuvent aussi contenir des renseignements pour aider les familles à bien choisir les services et les programmes de garde. Les familles peuvent ainsi mieux comprendre les informations sur les services de garde et sur le fonctionnement des services et des programmes de garde. Les lois sur les services de garde sont continuellement remaniées pour mieux atteindre l’objectif d’offrir aux enfants et à leurs familles des soins adéquats durant la petite enfance. Influencées par les points de vue des parents et des familles, ces lois sont mieux adaptées au monde où vivent les enfants.

Le nombre de directives contenues dans ces lois est souvent très différent de celui dans les lois sur l’éducation, qui traitent principalement du devoir d’appuyer la sécurité et l’instruction des élèves; la définition de la prestation des services est laissée aux politiques des conseils et commissions scolaires, et leur opérationnalisation est confiée aux écoles. Cette différence est particulièrement manifeste quand des programmes des services éducatifs et de garde à l’enfance (SÉGE) partagent des locaux avec une école, car les règles de prestation des SÉGE sont souvent très différentes de celles qui prévalent pendant les périodes scolaires. De plus, le non-respect des lois sur les services de garde ou de leurs règlements peut entraîner des sanctions administratives, des amendes, des ordonnances exécutoires et d’autres sanctions qui varient selon la durée et la gravité des infractions.

Bien que ces lois définissent les exigences des programmes des SÉGE, elles sont souvent limitées par la non-reconnaissance des avantages pour les enfants de participer à de tels programmes, comme la socialisation accrue et l’acquisition de compétences scolaires transférables (c.-à-d. l’apprentissage de la langue et les capacités de lecture, d’écriture et de calcul). Ces avantages sont décrits dans deux « examens de l’état des preuves »68,69, et des activités de plaidoyer ont été entreprises pour faire pression en faveur de l’élaboration de programmes de SÉGE universels70,71.

Les provinces et les territoires devraient s’efforcer d’offrir des directives cohérentes, éclairées par les données probantes et d’un niveau de détail semblable dans leurs lois sur l’éducation et sur les services de garde. Il faudrait également envisager l’adoption d’une loi pour rendre les programmes de SÉGE universellement disponibles. Ces programmes sont nécessaires en raison de leurs avantages avérés et de la demande et du besoin croissants de services de garde au Canada, qui résultent entre autres du nombre accru de femmes dans la population active et de familles monoparentales. Dans les faits, 46 % des parents d’enfants de 14 ans et moins ont utilisé un type de service de garde pour leurs enfants en 2011, et les données indiquent une tendance à la hausse de la demande et du besoin de ces services72.

Responsabilité et négligence
Comme les lois sur l’éducation et les services de garde, la responsabilité et la négligence sont de compétence provinciale ou territoriale, et les gouvernements des provinces et des territoires ont leurs propres fondements législatifs. Six provinces (Colombie-Britannique, Alberta, Manitoba, Ontario, Nouvelle-Écosse et Île-du-Prince-Édouard) ont une loi sur la responsabilité des occupants; trois autres provinces (Saskatchewan, Terre-Neuve-et-Labrador et Nouveau-Brunswick) et les trois territoires (Territoires du Nord-Ouest, Nunavut et Yukon) ont recours à la common law, à la jurisprudence et aux lois connexes. Le Québec a recours à son Code civil et à sa jurisprudence. La singularité de ces approches peut limiter les possibilités d’application de la jurisprudence d’une province ou d’un territoire à l’autre, mais toutes sont fondées sur la responsabilité du propriétaire de rendre les lieux « raisonnablement » sûrs et sont visées par l’obligation solidaire. Une telle démarche est radicalement différente de celle qui a cours en Norvège. Ce pays favorise la vie au grand air, ce qui comprend l’accès au jeu libre ou au jeu comportant des risques. La gestion des risques est la responsabilité de la personne qui entre sur les lieux, contrairement à la démarche canadienne, où c’est le propriétaire des lieux qui en est responsable. Il est entendu qu’il s’agit de deux façons fondamentalement opposées d’aborder le même problème, mais elles laissent entrevoir les profonds changements sociaux au Canada qui ont causé le mouvement d’abandon progressif du jeu libre.

Les entretiens menés pour le présent document montrent qu’au Canada, les municipalités et les conseils ou commissions scolaires s’inquiètent de la possibilité qu’un enfant se blesse sur leur propriété et de la probabilité de poursuites en justice (souvent lancées sur la plainte d’un parent ou d’un proche aidant), ce qui a des effets sur la prise de décisions67. Pour des raisons semblables, des municipalités ont appliqué des règlements limitant le jeu, notamment en imposant des amendes aux enfants qui grimpent aux arbres, en interdisant le hockey ou le jeu dans la rue ou en exigeant des permis d’accès aux lieux publics pour jouer. Ces mesures de sécurité sont souvent appliquées sans tenir compte des besoins développementaux des enfants, de la probabilité réelle d’accident ou de la gravité potentielle des blessures. Il en résulte des décisions limitatives (comme l’interdiction du toboggan sur les collines) quand, par exemple, des accessoires, des structures ou des activités de jeu ou des occasions de jouer sont supprimés pour réduire la probabilité de blessures. Ces décisions semblent contraires à l’idée de maintenir une aire de jeu « raisonnablement sûre ».

La difficulté est de distinguer les mesures de précaution (c.-à-d. retirer les aléas présents sur le site) des mesures d’accès au jeu comportant des défis (la possibilité pour les enfants de tester leurs limites). De l’avis de nombreux spécialistes du jeu, les aires de jeu devraient être « aussi sûres qu’il le faut » et non pas « aussi sûres que possible ». Autrement dit, les aléas doivent être supprimés, mais il doit rester des risques acceptables pour que les enfants profitent des bienfaits à long terme du jeu libre. Cette distinction est compliquée par la norme de l’Association canadienne de normalisation sur les « Aires et équipements de jeu » (CAN/CSA-Z614). Cette norme offre une base pour la sécurité des terrains de jeu qui vise à réduire au minimum la probabilité de blessures graves ou potentiellement mortelles, mais qui n’est pas faite pour tenir compte des besoins développementaux des enfants. C’est une norme volontaire, et son usage prévu n’est pas précisé. Par conséquent, son application dépend de l’utilisateur. Les pratiques courantes associées aux aires de jeux sont toutefois très influencées par cette norme, dont les exigences ou les consignes de sécurité peuvent être appliquées par les décideurs comme un seuil minimal. Ainsi, la prévention des blessures est valorisée, tandis que les bienfaits sociaux, psychologiques et physiques du jeu libre peuvent ne pas être pris en compte.

La question a fait l’objet d’un récent document de travail international sur les risques et la responsabilité à l’égard du jeu des enfants dans les lieux publics73. On y souligne entre autres le besoin : d’avoir de meilleures données sur le coût et la prévalence des litiges; de dialoguer avec les assureurs, les gestionnaires de risques et les avocats sur l’évaluation de la sécurité selon une démarche d’analyse des risques et des avantages; de promouvoir une démarche d’analyse des risques et des avantages pour l’évaluation de la sécurité; et d’élaborer une démarche de gestion des risques proportionnelle. De telles démarches sont aussi nécessaires au Canada, et elles pourraient être favorisées par un mécanisme de consultations locales dans tout le pays. Le but de ces consultations serait de connaître les préoccupations des acteurs et d’évaluer les avantages et les limites du soutien au jeu libre à l’échelle locale. Cela permettrait d’élaborer une démarche commune pour favoriser le bonheur des enfants et leur permettre d’acquérir les habiletés et les compétences nécessaires dans la vie adulte.

Obligation solidaire
Les questions de responsabilité et de négligence reposent sur le principe de l’obligation solidaire, selon lequel un demandeur (la partie lésée) ayant gain de cause dans une poursuite en responsabilité peut recouvrer jusqu’à 100 % de l’indemnisation qui lui est accordée auprès d’un défenseur en mesure de payer, quelle que soit la mesure dans laquelle le défenseur est jugé avoir été négligent. À cause de ce principe, les conseils ou commissions scolaires et les municipalités sont souvent parties à des poursuites même s’ils ne sont que minimalement responsables de l’incident sous-jacent. C’est pourquoi des municipalités et des conseils ou commissions scolaires sont connus pour avoir supprimé des activités comportant un élément de risque et mis en place des mécanismes et des équipements de jeux qui réduisent au minimum la possibilité de se blesser. Certains assureurs sont disposés à régler à l’amiable plutôt que d’obtenir une décision judiciaire, mais d’autres ont adopté une philosophie de réclamation – autrement dit, ils ne paient que lorsqu’il y a négligence. Des démarches uniformes à l’égard de l’évaluation des risques et du paiement des réclamations favoriseraient donc la mise en œuvre de meilleures politiques sur le jeu et jetteraient les bases d’une démarche d’analyse des risques et des avantages offrant aux enfants la possibilité de profiter des bienfaits du jeu libre. Il faudrait réformer l’obligation solidaire pour que l’indemnisation versée à la partie lésée soit directement proportionnelle à la mesure dans laquelle le défendeur a été négligent.

Une seule province a revu l’affectation des paiements pour négligence. La loi sur la négligence de la Saskatchewan prévoit la « répartition des dommages ou des pertes » et stipule que si un défendeur ne peut assumer sa portion des dommages-intérêts, le reste de la somme est également distribué entre les parties. Cela peut même inclure le demandeur si celui-ci est jugé porter une part de responsabilité dans la négligence. Une telle stratégie semble réduire les coûts pouvant résulter d’un procès favorable en Saskatchewan, mais il faudrait pousser l’analyse pour déterminer ses possibilités d’application dans d’autres provinces et territoires.

Résumé

Un thème commun se dégage de notre analyse : notre cadre juridique, nos structures organisationnelles et nos décisions institutionnelles peuvent par inadvertance causer des préjudices à long terme aux enfants canadiens et ne présenter que très peu d’avantages à court terme. Les données disponibles montrent que les enfants canadiens d’aujourd’hui sont moins en forme et ont une plus grande incidence de problèmes mentaux, affectifs et psychologiques que les générations antérieures. Ces données sont toutefois limitées parce qu’elles datent, qu’elles sont difficilement comparables et qu’elles ne sont pas assez détaillées pour éclairer la prise de décisions. En même temps, nos enfants jouent moins à l’intérieur et à l’extérieur, et leur accès au jeu libre est de plus en plus entravé. Bien qu’il soit difficile de prouver un lien de cause à effet, il est possible de tirer de solides conclusions sur l’existence d’un lien entre les changements systématiques en cours dans les structures de la société et des gouvernements et leurs effets sur les enfants. Ces effets néfastes systématiques sont qualifiés de violence structurelle dans la littérature des droits de la personne. Cette forme de violence est définie comme étant les structures, les pouvoirs et les relations de pouvoir de la société qui empêchent ou limitent la satisfaction de besoins humains fondamentaux74.

La violence structurelle est souvent associée à la pauvreté, à la race et à la souffrance sociale, et de nombreux acteurs sociaux déploient des efforts pour cibler les institutions qui ont élaboré, mis en œuvre et entretenu des démarches et des mécanismes causant systématiquement du tort à autrui. La violence structurelle peut aussi se manifester lorsqu’il y a atteinte à un besoin fondamental75. L’une de ces atteintes passées sous silence est le besoin fondamental des enfants de jouer librement. Dans le présent document, nous nous sommes efforcés de reconnaître les défis des démarches sociétales, judiciaires et législatives actuelles qui limitent involontairement le potentiel affectif, social, physique et mental de nos enfants. La difficulté est de déterminer où ces dommages se manifestent et le meilleur moyen de les réparer.

Recommandations

Il existe au Canada un noyau croissant de personnes et d’organismes qui reconnaissent les bienfaits du jeu libre des enfants et les défis engendrés par l’évolution du paysage social et réglementaire. Ce noyau travaille à relever ces défis à l’échelle locale, provinciale, territoriale et nationale, et réussit à inverser les tendances qui favorisent actuellement le jeu structuré. Les activités de ce noyau sont limitées par plusieurs problèmes pernicieux, mais qui pourraient receler des indices permettant d’inverser le mouvement d’abandon progressif du jeu libre. Nous avons classé ces défis en trois grandes catégories, et nous suggérons des moyens de les aborder.

Le nouveau visage des enfants au Canada
Le Canada est un pays multiculturel. En raison de sa diversité, il faut prendre des mesures pour être culturellement sensible et attentif aux besoins et aux préoccupations des cultures qui le composent. C’est d’autant plus vrai à l’heure actuelle, où nous tentons de répondre aux torts causés aux Autochtones et aux Appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation. L’influence du statut socioéconomique sur l’accès au jeu ajoute un autre élément de complexité.

Pour aborder ces enjeux, nous présentons les recommandations suivantes :

  • Offrir de la formation sur l’humilité, la compétence et la sensibilisation culturelles à toute personne qui joue un rôle dans l’accès des enfants au jeu.
  • Faciliter l’accès au jeu pour que tous les enfants du Canada aient un accès égal à des aires et des lieux de jeu sûrs et à des programmes qui appuient le jeu libre.
  • Appuyer l’élaboration et la mise en œuvre par les Autochtones de programmes de jeu pour leurs enfants.
  • Prévoir des fonds pour l’aménagement d’aires de jeu sûres et de programmes de jeu dans les quartiers de faible statut socioéconomique.
  • Encourager un climat social où le jeu à l’extérieur dans une diversité de milieux est normal et valorisé.

Perceptions des parents, des proches aidants, des éducateurs en garderie et des enseignants et communication des risques
Parents, proches aidants, éducateurs en garderie, enseignants, enfants et décideurs sont tous sujets aux influences de l’évolution du paysage des communications. Il peut s’agir de l’influence des pressions parentales à l’uniformité ou de la façon dont les décideurs répondent aux plaintes. Sont également influencées les façons dont les gens entendent, perçoivent et assimilent les informations. Ces influences peuvent être combattues en présentant les meilleures informations disponibles à ceux qui en ont besoin, sous une forme claire, concise et facile à comprendre. Nous pouvons par exemple utiliser les médias sociaux pour influencer l’opinion publique, fournir des informations factuelles aux décideurs, et trouver et appuyer des champions locaux. De même, en prenant des mesures qui soutiennent clairement l’accès au jeu et en offrant des programmes qui favorisent cet accès, l’État et les grandes entreprises peuvent influencer les réactions et les décisions des gens.

Pour aborder ces enjeux, nous présentons les recommandations suivantes :

  • Créer et appliquer de grandes stratégies de communication et d’utilisation des médias sociaux pour renseigner les parents, les proches aidants, les éducateurs en garderie et les enseignants sur les bienfaits du jeu libre.
  • Miser sur le succès de la charte du jeu de Calgary (Calgary Play Charter) en soutenant ou en créant des démarches semblables dans d’autres municipalités afin d’élargir notre influence à d’autres villes du Canada.
  • Songer à créer une désignation de « Ville amie du jeu » appuyant la création d’une « Charte nationale du jeu » et constituant une feuille de route pour les villes qui souhaitent favoriser le jeu des enfants.
  • Investir dans une campagne soutenue de communication et de publicité dans les médias sociaux sur le jeu à l’extérieur; cette campagne d’envergure nationale doit être imaginative, multiniveaux, multisectorielle et multimodale.

Responsabilité juridique
Les provinces et territoires établissent le cadre juridique général de l’accès au jeu. Ainsi, chaque sphère de compétence peut adapter ses stratégies aux besoins de ses citoyens. Par contre, la complexité de ce cadre limite l’élaboration et l’application de stratégies nationales. De même, chaque province et territoire a des lois et des règlements particuliers en matière d’éducation et de services de garde, et des lois sur la responsabilité et la négligence dont la complexité peut entraîner des disparités dans les stratégies.

Pour aborder ces enjeux, nous présentons les recommandations suivantes :

  • Élaborer un document de base qui résume les différences dans les lois, les règlements et les polices d’assurance au Canada.
  • Élaborer un résumé de la jurisprudence des litiges fondés sur le jeu.
  • Préparer un document de comparaison qui résume les différences dans les lois et les règlements de pays comparables.

Éducation et services de garde
Sous leur forme la plus simple, les lois sur l’éducation décrivent les exigences et les mécanismes nécessaires à l’instruction des enfants. Les orientations qu’elles contiennent sont utilisées par les conseils et commissions scolaires pour élaborer des programmes et des stratégies dans les districts qu’ils servent et pour en confier l’exécution aux écoles. Aux différents paliers du système, des disparités peuvent se manifester dans l’application des orientations par les conseils ou commissions scolaires et par les écoles. De plus, il est reconnu que les enseignants doivent s’occuper des enfants comme le ferait un parent avisé et éclairé (in loco parentis), mais il n’existe pas de cadre sous-jacent pour évaluer si ce critère est respecté ou non. Les règles sur l’accès à la récréation constituent un cas de figure. Les lois sur les services de garde, par contre, donnent des orientations précises sur l’aménagement des milieux de garde, mais très peu sur les programmes de garde.

Pour aborder ces enjeux, nous présentons les recommandations suivantes :

  • Dans chaque province et territoire, élaborer et appliquer des programmes et des politiques uniformes d’un conseil ou d’une commission scolaire à l’autre et d’une école à l’autre.
  • Dans chaque province et territoire, examiner la cohérence et les disparités des lois sur l’éducation et sur les services de garde, puis élaborer et appliquer des mesures législatives ou administratives qui favorisent l’uniformité d’accès au jeu libre dans ces deux milieux.
  • Élaborer et appliquer des stratégies cohérentes à l’égard de la récréation pour que chaque enfant ait accès au jeu libre tous les jours en milieu scolaire.
  • Élaborer un cadre pour évaluer si une mesure respecte l’exigence de loco parentis prévue dans les lois.
  • Élaborer et instaurer une loi à l’appui de programmes de SÉGE universels donnés par des professionnels.

Responsabilité et négligence
Les questions de responsabilité et de négligence tombent aussi sous la coupe des lois provinciales et territoriales. À l’heure actuelle, six provinces ont adopté des lois sur la responsabilité des occupants, trois provinces et trois territoires ont recours à la common law et à la jurisprudence, et le Québec a instauré une démarche fondée sur ses règles de droit commun. Chaque situation repose sur la notion de ce que pourrait faire une personne raisonnable, ce qui laisse aux tribunaux le soin de déterminer si une action est ou non raisonnable. Un deuxième principe qui donne matière à réflexion est celui de l’obligation solidaire, qui donne des indications sur le paiement d’une indemnisation et peut entraîner l’inclusion, dans une poursuite, d’un conseil scolaire, d’une commission scolaire ou d’une municipalité même si ces parties n’ont eu qu’une influence limitée sur la situation. Le mode d’évaluation des risques et des aléas pose un problème supplémentaire, et par extension la notion de « raisonnabilité ». Au Canada, la principale norme d’évaluation des équipements et des aires de jeu a été élaborée dans une perspective de prévention des blessures sans tenir compte des besoins développementaux des enfants. Un cadre et une démarche d’analyse des risques et des avantages permettraient de concilier plus équitablement la prévention des blessures et le développement de l’enfant tout en permettant peut-être de tenir compte de la notion de raisonnabilité.

Pour aborder ces enjeux, nous présentons les recommandations suivantes :

  • Examiner la jurisprudence disponible sur la responsabilité et la négligence en matière de jeu des enfants en vue d’instaurer un cadre de « raisonnabilité » qui pourrait être utilisé partout au pays.
  • Réformer l’obligation solidaire pour mieux concilier le degré de responsabilité du défendeur et le montant de l’indemnisation à verser.
  • Élaborer pour les aires de jeu des enfants une stratégie d’analyse des risques et des avantages fondée sur les lois canadiennes actuelles et convaincre tous les partenaires et acteurs de s’entendre sur son utilisation.

Derrière bon nombre de ces enjeux se cache le besoin d’avoir des données et des informations récentes, exactes et comparables pouvant servir à l’élaboration d’une politique efficace qui concilie l’élimination des aléas et les bienfaits du jeu libre. Les données actuellement disponibles sont souvent périmées et ne sont pas suffisamment détaillées pour permettre une prise de décision éclairée ni pour comparer efficacement les informations de différentes sphères de compétence. Il faut entreprendre des démarches pour renouveler les méthodes actuelles en élaborant des mécanismes et des procédures sous-jacents qui offrent à ceux qui en ont besoin des informations claires, facilement assimilables et en phase avec la situation canadienne.


aIl n’existe pas de définition théorique du « jeu libre », mais l’expression en est venue à être utilisée comme un terme générique pour désigner le jeu dirigé par l’enfant qui se déroule de préférence en plein air, mais aussi à l’intérieur, et qui inclut la notion de jeu « risqué ». Son utilisation s’est imposée, car les décideurs hésitent à employer le mot « risqué » pour décrire le jeu.

bSelon la théorie sociale cognitive, les gens apprennent en regardant les autres; en psychologie, cette théorie explique la personnalité d’après ce qu’une personne pense de son environnement social et la façon dont elle y réagit. (Pour une description plus poussée, voir http://sphweb.bumc.bu.edu/otlt/MPH-Modules/SB/BehavioralChangeTheories/BehavioralChangeTheories5.html – en anglais.

cLes connaissances heuristiques désignent les raccourcis mentaux qui permettent de résoudre des problèmes et de porter des jugements rapidement. Ces règles approximatives raccourcissent la prise de décision et permettent de fonctionner sans s’arrêter continuellement pour réfléchir à sa conduite ultérieure. Les connaissances heuristiques sont utiles dans de nombreuses situations, mais peuvent entrainer des biais cognitifs. Pour une définition plus complète, voir https://www.verywellmind.com/what-is-a-heuristic-2795235r – en anglais.


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Date de modification : 21 janvier 2019